Est-ce qu’une sage-femme a une compétence dans une salle d’intervention pour la chirurgie ?
Sage-femme est une profession médicale avec des compétences définies. La profession de sage-femme n’appartient pas à la catégorie des auxiliaires médicaux.
En matière de chirurgie, l’article R4127-318 du code de la santé publique et le décret n° 2024-367 du 23 avril 2024 encadrent les champs de compétence médicale de la sage-femme. Ainsi la sage-femme est compétente pour réaliser certains actes qui relèvent de l’art chirurgical :
- l’épisiotomie ;
- la réfection de l’épisiotomie non compliquée ;
- la restauration immédiate des déchirures superficielles du périnée ;
- et l’interruption volontaire de grossesse instrumentale.
Il s’agit de compétences chirurgicales partagées par définition avec les médecins.
Les autres interventions chirurgicales, comme notamment la césarienne ou le traitement chirurgical de la grossesse extra-utérine rompue hémorragique, etc … par exemple, ne sont pas prévues par les textes en vigueur.
Certains actes chirurgicaux nécessitent un bloc opératoire et le praticien opérateur – quelques soient sa profession médicale – peut avoir besoin d’une aide-opératoire voire d’un instrumentiste. La présence de l’article L4311-13 du code de la santé publique disposant les conditions des actes d’assistance auprès d’un praticien au cours d’une intervention chirurgicale les personnels aides-opératoires et aides-instrumentiste au sein du chapitre Ier sur les règles liées à l’exercice de la profession d’infirmier démontre que ces actes ne relèvent uniquement de la profession d’infirmier (livre III précise l’appartenance de cette profession aux auxiliaires médicaux).
Référentiel de compétences IBODE Fiche métier IBODE du Gouvernement
De point de vue législative mais aussi de l’éthique déontologique, instrumenter, ouvrir un bloc opératoire et assurer sa traçabilité, préparer une salle d’opération, participer au processus de stérilisation tout comme sa traçabilité, réaliser le comptage des compresses pour un acte chirurgical dont elle n’a pas la compétence ne relèvent pas de la mission de la sage-femme.
Cas de l’urgence
Seule une urgence immédiate, qui peut être caractérisée par un code Lucas rouge par exemple, pourrait faire décider exceptionnellement une sage-femme à intervenir.
La sage-femme doit alors se poser ces questions :
1) Y-a-t-il un danger imminent pour la patiente ou son nouveau-né pouvant entraîner des séquelles irréversibles ou mortelles ?
La notion d’imminence est essentielle. La sage-femme a-t-elle le temps de joindre le médecin ? car cela doit être son premier réflexe, en application de l’article L. 4151-3 du code de la santé publique.
La sage-femme a-t-elle le temps d’attendre le médecin joint ? d’attendre le personnel qualifié ? de demander le transfert de la patiente ? Dans l’affirmative, elle s’abstient de réaliser un acte dépassant son domaine de compétence (telle que la préparation du matériel).
Il appartient à la sage-femme d’apprécier la nécessité et la nature de cette intervention.
2) La réalisation de l’acte aura-t-elle pour effet de maintenir en vie la patiente ou d’écarter le risque de séquelles irréversibles ?
Cette question renvoie à la nécessité de l’acte. Si l’acte n’est pas indispensable pour la survie ou écarter le risque de séquelles irréversible, sa réalisation de la sage-femme ne sera pas justifiée. Il s’agit également d’écarter les actes totalement disproportionnés au regard des compétences de la sage-femme. Elle délivre ainsi l’assistance en fonction des moyens à sa disposition.
En pratique, ces questions soulèvent des choix éthiques, médicaux en fonction des situations cliniques que la sage-femme ne peut résoudre seule.
C’est pourquoi les établissements de santé mettent en place des protocoles en amont sur ces situations exceptionnelles de l’urgence immédiate – en aucun cas d’un protocole de mode dégradé en cas de manque de personnel qui renvoie à une organisation en cas de carence prévue qui est habituelle, récurrente, non exceptionnelle voire normale. L’exceptionnel n’est pas une norme. La sage-femme détachée de sa mission dans le secteur naissance – prévue par le décret no 98-900 du 9 octobre 1998 – doit se libérer du bloc opératoire au plus vite pour intervenir sur le secteur naissance afin de ne pas mettre en péril ses patientes. La carence organisationnelle nécessite alors d’être résolue. A défaut de résolution, la sage-femme se retrouve en situation de manquement déontologique : en effet, l’article R4127-309 du code de la santé publique dispose que « la sage-femme doit disposer au lieu de son exercice professionnel d’une installation convenable et de moyens techniques suffisants. En aucun cas, la sage-femme ne doit exercer sa profession dans des conditions qui puissent compromettre la sécurité et la qualité des soins et des actes médicaux. »
cf FAQ CNOSF
Conseil de bloc
La circulaire DH/FH/ n° 2000-264 du 19 mai 2000 relative à la mise en place des conseils de bloc opératoire dans les établissements publics de santé ne prévoit pas de sage-femme siégeant au conseil de bloc. Une sage-femme n’a donc aucune légitimité administrative pour siéger au conseil de bloc – il n’y a aucune base législative, règlementaire ou administrative à son siège.
En revanche, la circulaire prévoit un siège pour cadre de santé infirmier anesthésiste diplômé d’Etat, s’il existe, ou un cadre de santé infirmier de bloc opératoire désigné (…) sur proposition de la sage-femme coordinatrice pour les personnels de blocs obstétricaux. Un cadre de santé IADE ou IBODE – nécessaire à la bonne ténue d’un bloc opératoire – doit donc siéger et, en aucun cas, une sage-femme coordinatrice du secteur naissance.