Quels sont les conséquences du dépassement de compétence réglementaire ?

La profession de sage-femme est une profession médicale aux champs de compétence définis. Actuellement, c’est le code de déontologie qui définit ces champs dans l’article R4127-318 du code de la santé publique. Le dépassement de compétence induit des responsabilités qui ont des conséquences pour la sage-femme. 1. Sur la causalité en cas de complication Le lien de causalité entre un acte réalisé par une personne non-qualifiée pour le réaliser et la complication a fait l’objet d’une jurisprudence de la Cour de Cassation dans un arrêt du 25 octobre 2004. Il établit que « la faute commise est en relation causale avec le préjudice subi« . 2. Sur la responsabilité 2.2 Responsabilité civile et sa couverture assurantielle Une assurance de responsabilité civile ne peut en aucun cas couvrir les actes médicaux d’une sage-femme qui dépasse sa compétence : cette assurance constituerait un trouble à l’ordre public car elle couvrirait un acte illégal. Le droit fondamental du patient à la réparation est donc remis en cause. Les indemnisations pourraient alors être à la charge de la sage-femme, et à son employeur dans l’exercice salarié. 2.3 Responsabilité pénale 2.3.1 Responsabilité pénale de la sage-femme 2.3.1.1 Sur l’exercice illégale et la notion d’actes réservés à des professions réglementées La sage-femme n’étant pas habilitée à réaliser les actes d’autres professions de santé réglementée qui n’appartiennent pas à ses propres champs de compétence (médecin, infirmier, masseur-kinésithérapeute, manipulateur en électroradiologie médicale, etc …), leur réalisation constitue l’infraction d’exercice illégal de leur profession (article L4314-4 du code de la santé publique pour les infirmiers par exemple).  2.3.1.2 Sur le délit de mise en danger d’autrui D’autre part, en dépassant ses compétences, la sage-femme est susceptible de commettre le délit de mise en danger délibéré d’autrui, conformément à l’article 121-3 du Code pénal. En effet, il dispose : « Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ».  Le manquement à l’obligation de prudence et de sécurité par une sage-femme a déjà été reconnu par la jurisprudence (Cass. Crim., 4 mai 2004, n° 03-86175).  De plus, sur le même fondement de manquement à l’obligation de prudence et de sécurité, elle pourra s’exposer à une accusation pour mise en danger d’autrui ou homicide involontaire (articles 221-3 et 221-6 du Code pénal). 2.3.2 Responsabilité pénale des personnes physiques ayant contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage  Dans le cas de mise en danger délibérée, l’article 121-3 al.4 du code pénal énonce :  « Lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui.[…] Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ». Par conséquent, les personnes physiques ayant contribué au dépassement de compétences seraient susceptibles d’être tenues responsables pénalement de la mise en danger délibérée d’autrui. L’article 40 du code de la procédure pénale oblige tous agents publiques à signaler au procureur de la République les crimes et délits. Les infractions, délits et crimes sont l’objet de sanctions pénales : de la contravention à la peine de prison. 3. Sur le manquement déontologique Sur le fondement de l’article R4127-313 du CSP, disposant que « dans l’exercice de sa profession, la sage-femme ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, effectuer des actes ou donner des soins, ni formuler des prescriptions dans les domaines qui débordent sa compétence professionnelle ou dépassent ses possibilités ». Le manquement déontologique expose à la sanction disciplinaire : du blâme à la radiation définitive. Si pour garantir la sécurité des patientes et des nouveau-nés, une sage-femme est contrainte à réaliser un dépassement de compétence, nous l’invitons à signaler les faits auprès de l’Ordre des sages-femmes par son Conseil départemental.